Il y a 70 ans : KOH-CHANG

Le 17 Janvier 1941 les forces navales françaises d’Extrême Orient envoyaient par le fond le tiers de la marine de guerre du SIAM. A cette date personne ne s’intéressait au sort des « oubliés du bout du monde » qui, en Indochine, s’opposaient vaillamment aux envahisseurs nippons et siamois.

Pourtant dès le mois de Septembre 1940 la 5ème division du général NAKAMURA venant de chine, forçait la porte de LANGSON pour couper le flux logistique qui alimentait l’armée chinoise de TCHANG KAÏ CHEK par le TONKIN. Des soldats français et indochinois furent les premiers d’une nation occidentale à tomber sous les balles japonaises dans une guerre du PACIFIQUE qui n’est pas encore déclarée. Surpris par une résistance farouche et inattendue, le MIKADO ordonnait l’arrêt des hostilités ne voulant pas, avant PEARL HARBOR, dévoiler prématurément des visées expansionnistes.

A partir du mois d’octobre 1940 les siamois prolongent l’action de leurs alliés nippons par de multiples agressions à l’ouest du MEKONG auxquelles s’oppose notre petite armée sous équipée. Le commandement français en Indochine décide alors de mener une contre attaque terrestre accompagnée d’un raid naval sur les côtes du SIAM.

Pour la circonstance, une petite escadre est constituée sous le commandement du capitaine de vaisseau BÉRENGER à bord du croiseur « LAMOTTE-PICQUET ».Elle comprend en plus du croiseur, les avisos « DUMONT D’URVILLE » (CV TOUSSAINT DE QUIEVREMONT) « AMIRAL CHARNER » (CF LE CALVEZ), « MARNE » (CC MARC) et « TAHURE » (CC MERCADIER). C’est à peu près tout ce qui est capable de prendre la mer pour mener un combat à l’issue incertaine contre un ennemi plus nombreux et mieux armé.

Le 15 Janvier 1941 au crépuscule les navires sont dans la baie au Sud ouest de POULO-CONDOR lorsque la mission est donnée de rechercher et détruire les forces navales siamoises dans une zone côtière entre SATAHIB et la frontière Cambodgienne. Dès la nuit tombée les français cinglent vers l’ouest pour arriver avant l’aube dans le golfe du SIAM. Le lendemain les hydravions en reconnaissance découvrent la flotte ennemie au mouillage, une partie à SATAHIB et l’autre dans l’archipel de KOH CHANG. La décision est prise d’attaquer dès le jour naissant le deuxième groupe plus proche et plus vulnérable.

L’aube claire du 17 Janvier permet aux siamois de découvrir la petite flotte française qui se profile à l’horizon et d’ouvrir instantanément le feu. Dans l’ensemble les tirs ne soulèvent que de grands geysers très dispersés. La riposte française est immédiate. Le « LAMOTTE-PICQUET » tire des salves de gros calibre et lance les premières torpilles tandis que les avisos ouvrent le feu à leur tour. L’observation de l’arrivée des obus permet de voir qu’ils causent des dégâts importants. Deux torpilleurs ennemis ne réagissent plus et sont évacués par leurs équipages avant qu’ils n’explosent et s’enfoncent dans les flots. Il s’agit du « CHOLBURI » et du « SONGKLA ».

Après cet engagement rapide et désastreux pour les siamois nos navires traquent ce qui reste de l’ennemi pris au piège.

Alors que le soleil se lève le « LAMOTTE-PICQUET » masqué derrière l’île de MAIZE aperçoit le « DOMBURY » un des deux garde-côtes cuirassés construits récemment au Japon et puissamment armés qui file vers le Nord. Aussitôt il l’engage au canon suivi par la meute des avisos. C’est une lutte tournoyante autour des îles et vingt minutesplus tard les français concentrent leurs tirs sur un adversaire aux réactions toujours dangereuses. Un incendie se déclare alors sur le « DOMBURY » qui cherche à s’esquisser vers la côte après avoir reçu un déluge de projectiles qui le met hors de combat.

A neuf heures trente considérant que sa mission est pleinement remplie le capitaine de vaisseau BÉRENGER donne l’ordre de mettre le cap sur le grand large après qu’une intervention de l’aviation siamoise fût aisément repoussée par la DCA.

Le 19 Janvier les cinq navires après avoir regagné leur base à SAÏGON reçoivent un accueil triomphal. Cette belle victoire est la première des armes de la FRANCE après sa défaite en Europe. Le nom de KON CHANG retentit comme un coup de tonnerre dans le ciel d’Extrême-Orient. Elle stupéfie les japonais et les anglo-saxons.

Leur surprise passée les nippons s’inquiétèrent soudainement de la situation de leur allié et jugèrent qu’il était grand temps d’intervenir. Le Japon nous imposa une médiation menaçante alors que nos forces n’étaient pas armées pour y faire face. L’arrêt des hostilités fût fixé au 28 Janvier et l’armistice signé trois jours plus tard.

Le 17 Novembre 1946 l’accord de Washington restituait au Cambodge et au Laos leurs provinces perdues en 1941 tandis que la France et la THAÏLANDE anciennement le SIAM renouèrent leurs relations diplomatiques.