Questionnements de l’ANOCR – introduction

Notre société vit dans une permanente évolution, sous l’influence des innovations technologiques qui rapprochent les personnes, de la mondialisation qui met en contact les cultures, des progrès de l’homme dans sa connaissance du monde et des institutions internationales qui promeuvent la paix.

« Si vis pacem para bellum » est la devise de l’Ecole de Guerre. La dissuasion nucléaire, la puissance des armements modernes, le refus des pertes humaines semblent nous éloigner de ce précepte tout en sagesse. Aurait-on oublié que la préparation de la guerre de demain ne consiste pas à doter le pays des moyens de la défense d’aujourd’hui, encore moins de celle d’hier, quoiqu’ils n’aient jamais été aussi réduits, mais à en imaginer les conditions, recruter et former les troupes nécessaires et produire les armes qui seront alors utiles et efficaces ?

Dans sa contribution au débat préparatoire à la Loi de Programmation Militaire votée par l’Assemblée Nationale en novembre 2013, et au sommet de l’UE de décembre 2013, consacré sous l’impulsion de la France, à l’Europe de la Défense qui voudrait déboucher sur une quelques interrogations auprès de ses membres qui voient notre outil de Défense se réduire dangereusement et notre institution militaire se dénaturer petit à petit.

L’institution militaire est au service de la Nation et non d’intérêts particuliers ou sectoriels. Ultime recours de la Nation, elle a vocation à agir par les armes et aussi en assistance à la population si la situation l’exige, en cas de catastrophe naturelle par exemple.

Les armées, engagées dans des situations généralement exceptionnelles et souvent dangereuses, n’auront l’efficacité que l’on attend d’elles que si elles s’appuient sur :

  • en premier lieu, un statut militaire particulier exigeant des personnels une totale disponibilité, une mobilité sans réserve, une discipline sans faille et un esprit de sacrifice au service de la mission, qui constituent la spécificité du militaire par rapport aux autres citoyens,
  • en second lieu, l’unité de commandement couvrant toutes les fonctions concourant à l’action opérationnelle,…
  • et aussi une forte cohésion des unités, des formations et des moyens adaptés.

Ces éléments fondamentaux de l’institution militaire sont-ils bousculés voire remis en cause par l’accumulation des décisions prises en matière de défense depuis une vingtaine d’années, décisions qui paraissent surtout guidées par un souci d’économies ?

« Cedant arma togae » (Cicéron, Des Devoirs).

Le Militaire cède le pouvoir au Civil quand la sécurité du pays est assurée. Ainsi que l’a décrit Alfred de Vigny, si la condition militaire a ses grandeurs, elle a aussi ses servitudes. En France, c’est en 1945 seulement, sous l’impulsion du général de Gaulle, que les militaires ont obtenu le droit de vote, un an après les femmes. Cependant, et c’est là une différence fondamentale avec la fonction publique, ils ne peuvent ni se syndiquer, ni être membres d’un parti politique, ce qui les rend transparents aux yeux des électeurs. Ils restent de toute manière réservés devant les promesses intenables qu’implique fatalement le système électoral et leur rigueur les retient trop souvent de présenter leur candidature pour des élections. Cette place à part du Militaire dans la société, qu’il cultive volontiers, ne facilité cependant pas la compréhension du monde militaire par le citoyen et par la représentation nationale.